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50 - ROTUROA : WHAKAREWAREWA

Rotorua est une étape particulière de ce voyage. L’esprit des maoris inonde ce pays, il me semble qu’il en fait une force pour le béotien que je suis. C’est étrange de parler ainsi alors que déjà l’an dernier au Musée National Te Papa Tongarewa à Wellington, j’avais aimé me promener dans l’espace qui est réservé au peuple maori.









Les maoris représentent aujourd’hui environ 15% de la communauté néozélandaise. Le traité de Waitangi a permis aux colons britanniques de faire ce qui les arrangeaient. Ils ont fait battre les tribus les unes contre les autres parfois des mercenaires s’en sont mêlés. Depuis le début de la colonisation les maoris se sentent floués et même encore aujourd’hui certains seraient en mesure d’argumenter pour contester ce traité. 

Au Musée National rien de tout cela n’est caché, chacun est mis devant ses responsabilités. Depuis des années je suis le rugby des néozélandais, c’est le fil rouge de ce voyage en termes d’images et du plaisir de voir de près le jeu de rugby et sa philosophie qui m’ont servi de philosophie tout au long de ma vie.

Avant de venir, plusieurs livres m’ont accompagné et dans chacun l’esprit maori est inscrit. J’en ai d’autres à lire après deux mois ici, Mervyn, Rosemary, Graeme m’ont donné des pistes à explorer. Je sens cependant que ce sont les colons qui ont appris le plus en arrivant en Nouvelle Zélande. Je veux dire que comme moi ils ont été séduits par ce qu’ils ont appris des Maoris. 

J’ai fait des études scientifiques pour ne pas dire purement techniques puis un jour j’ai été amené à étudier le comportement des hommes pour mettre leur métier dans les ordinateurs. J’ai appris ce qu’était une image mentale. Depuis j’ai admis que les maoris, les aborigènes mais les chinois aussi puissent avoir un autre mode de pensée que ce j’ai appris depuis tout petit.


En arrivant à Rotorua il était clair que je ne voulais pas voir un village maori folklorique. J’ai aimé me trouver dans la Nation Navajo à Monument Valley et j’ai détesté assister au piètre spectacle des indiens canadiens dans leur réserve.
Whakarewarewa a été choisi par Françoise sur ces critères et aujourd’hui je l’en remercie. Je ne savais pas ce qui nous y attendait mais je apprécié en arrivant là que le village soi réellement habité et qu’il vive encore des activités de ses habitants. Tous ceux qui y sont actifs n'habitent pas toujours le village. D'autres habitent au village et ont leurs activités en ville.

Un des bassin d'eau chaude...
Pourquoi avoir choisi de placer le village au milieu des cratères de géothermie ? Pour faire cuire les légumes du hangi ? Certainement pas. Te Puia était une forteresse qui n’a jamais été prise. Ses habitants n’avaient pas besoin de chauffage, ils avaient appris à ouvrir des puits pour trouver de l’eau chaude pour leur faciliter la vie. 
L'eau jaillit à 120 ° !!!
https://youtu.be/M23qnnXF69g



J’aime cette capacité des néozélandais de prendre conscience de problèmes de l'écologie et de tenter de les régler. Je ne sais pas dire d’où cela vient mais face au désastre de la déforestation ils ont pris des mesures pour retrouver une forme de biodiversité plus vraie, il y a déjà un siècle. Pour la géothermie ce fut la même démarche et le village continue de vivre où il fut implanté. Des activités commerciales ce sont créées pour servir d’exemple comme des sanctuaires privilégiés. Depuis 1325 c'était la vie de cette communauté. En 1987-88 un programme d'harmonisation de la géothermie a été mis en place pour éviter les dérives. Plus de 200 puits ont été fermes. La terre s'est de nouveau mise à mieux respirer.




Des zones éruptives de cette sorte ne sont pas si nombreuses surtout quand elles servent la vie de tous les jours. Dans le village de Whakarewarewa pas de manifestation de geyser particulière mais une activité thermale qui sert la vie de ses habitants. Elle est voisine du Pohutu, le plus célèbre qui entre en irruption toute les heures. Cette activité est complexe mais elle est systémique. Ce qui fait que depuis que des puits privés ont été fermés l’activité des puis restants est plus spectaculaire.

Le village comprend une école primaire (une garderie aussi) et une église cadres de la vie naturelle. Les maoris sont très attachés à la religion. Ils ont été convertis par des prêtres anglicans le plus souvent. Ils n’ont pas forcément renié toutes leurs croyances mythologiques. Cette force divine se dilue dans leur vie et se retrouve sur un terrain de rugby. Le haka qui précède chaque match des All Blacks fait une publicité particulière au maillot noir frappé de la fougère argentée. 
Un point commun entre le jardin et le cimetière,
tout doit se faire hors sol....













Les bains communaux, c'est pratique,
 mais il faut attendre que ça refroidisse...
La climatisation n'est pas réversible...

Place du village avec le Wharenui ,
la maison la plus importante  pour le bien de tous.
Le haka n’est pas interprété qu’en manifestation de jeu. Il fait appel à l’esprit des anciens pour donner plus de force au moment présent. C’est peut-être pour un match mais plutôt un événement, un changement dans le déroulement des choses de la vie, heureux ou malheureux, une naissance ou la mort d’un proche, un mariage, un départ, un projet comme si chacun voulait montrer que la vie n’est pas une banalité.
L’esprit maori à travers sa mythologie donne de l’importance à la poésie. La poésie des mots avec les légendes ou les chants mais aussi la poésie des gestes et des attitudes. Les maoris savent nous dire que leurs légendes parlent d’un paradis mais aussi d’un feu d’enfer et de la peur. Leurs figurines ou leurs mimiques ne sont pas anodines, elles expriment chaque moment de la vie. 

Les attitudes au cours des danses mettent en avant leur dextérité pour jouer avec leurs bâtons, ils jonglent comme avec un ballon. C’est impressionnant de les voir lancer leurs instruments, un moment d’égalité entre filles et garçons quand ils échangent leurs émotions. Les filles commencent le haka pour donner le ton et montrer qu’elles sont pilier de la famille et les garçons entrent alors en jeu pour montrer qu’ils savent les protéger. 
Ce spectacle donne de l’activité au village. Le show qui est présenté, sa patronne y apporte son authenticité. En voyant les acteurs avant et après cela permet de comprendre que la vie n’est pas aussi simple qu’il y paraît. Je vais attendre un peu pour en dire plus mais il me semble que la vie du village va pouvoir continuer. Il est organisé, je souhaiterais simplement que lors du show les touristes maladroits ne gâche pas le tableau des artistes chargés de nous montrer la réalité cachée de leur vie.

Je retrouve en effet dans les chants que l’on ne comprend pas les accents de la Polynésie Française et du ukulélé qui de temps en temps nous a bercé à la radio ou à la télé. Cette double facette des maoris, calme presque nonchalant qui tout d’un coup devient un guerrier pour un match de rugby ou sait exprimer sa conviction face à un évènement qui mérite attention.



J’ai beaucoup de respect pour les valeurs exprimées lors du haka comme dans celui du hongi. Il faut avoir confiance pour toucher un ami. Notre éducation d’européen se contente de serrer la main. Le hongi en dit un peu plus le nez et le front sont des parties sensibles de notre anatomie, les mettre en contact n’est pas neutre pour ouvrir ou fermer une rencontre. 
Le show terminé, le village a conservé un tour géothermique. En fait il fait la promotion de l’espace environnant. Après avoir visité sa cuisine naturelle pour cuire les légumes, le poulet et le bœuf du hangi, la visite des cratères (un œil sur le geyser du Pohutu tout proche) vous donne des envies d’en voir un peu plus. 
Restaurant et boutiques complètent la vision d’un village vivant comme nous voulions le découvrir. 
Comme vous voyez l'eau chaude est au fond du jardin .....
Nous allions partir en remerciant notre accompagnatrice quand Blair Millar est intervenu. C’est le CEO de Whakarewarewa. Comment les fils se sont noués nous ne saurons jamais mais en quelques pas des liens se sont serrés. Nous l’avons accompagné dans son bureau et pris les références suffisantes pour nous lier. 
Une petite rue commerçante comme partout ailleurs...
 Le lendemain matin, je réalisais que le hongi méritait de partager un peu plus de temps pour mieux comprendre les réalités de ce village si particulier. Blair est chargé de porter ailleurs dans tous les pays étrangers la cause des maoris. La nouvelle Zélande s’occupe de son économie et le tourisme en fait partie. Le village tel qu’il est construit à son importance et le mieux est de le faire savoir. Dans cette vie nous trouvons un attrait, celle d’une plus grande authenticité. Nous avons aimé en plein hiver trouver des portes ouvertes, des sourires, une vie. 
Quelques mails pour prendre rendez-vous et nous retrouvions pour déjeuner, le hangi était prêt. Le village a vu naître plus de 2000 enfants et ils reviennent passer du temps dans le village. La diaspora maorie existe aussi, beaucoup vivent en Australie mais leurs racines sont sur les îles du nord et du sud de ce pays. 






Nous avons perçu au cours de ce voyage que ce sont peut-être les colons qui ont pris les valeurs et les modes de pensées associés du peuple maori. Ils ont transcrit cela dans leurs tâches journalières, une capacité à réfléchir autrement. Les néozélandais au plan social ont été novateurs comme au plan technique. Isolés, loin de tout, il fallait bien qu'ils se débrouillent. Ils ont porté ces valeurs dans le sport, pour dans plusieurs disciplines devenir les premiers, en rugby mais aussi en nautisme et dans des activités de casse-cou qui font leur réputation. Sir Edmund Hillary est de ce pays, premier conquérant du mont Everest.
Il me reste à savoir pourquoi les maoris n’ont pas pris plus de savoir des européens. Il me semble qu’encore ce sont des problèmes d’éducation; il me reste quelques semaines pour poser des questions.


Ce déjeuner avec Blair nous aura permis de découvrir le travail de l’artiste du village Kohatu Ataahua (Ralph Hamon) . Dans son atelier, il a gravé quelques pièces magnifiques de vérité que je rapporterai, elles feront passer un peu de ce message à ceux que j’aime. 









Le danger que j’entrevoie est que la culture des maoris ne se résume pas à l’Histoire et à l’artisanat. Les valeurs de leur culture méritent qu’elles soient mieux connues. Leur pugnacité pour faire reconnaître le fleuve Whanganui comme personne juridique après 150 ans de lutte en dit long sur leur capacité à apporter des idées au monde. Les juristes américains en rêvaient, les maoris l’ont fait.

Ce bas relief de 2m raconte la légende du rattachement des 2 îles de NZ...
Du nord au sud nous nous sommes promenés dans une nature qui retrouve ses racines originales et chaque fois je me dis qu’un lac ou un arbre à sa légende. Quand je me baisse pour plonger ma main dans l’eau ou que je m’appuie sur le tronc pour prendre son énergie, je touche une part de l’esprit maori. 
Une impression d'être, par endroit, sur une autre planète !!!!
 Mais ce n'est qu'un début...
Je ne vous ai pas tout dit pour la bonne raison que je n’ai pas tout compris mais ce début augure d’autres moments où je reviendrais ici. Je n’ouvre jamais une porte sans savoir la refermer.



Michel Prieu
Facebook : Michel Prieu
Email : michelprieupassion@gmail.com
Blog Rugby: variationsetideesrugby.blogspot.com

Illustrations, Photos et Mise en page : Francoise Devillechabrolle
Email : francoise.devillechabrolle@gmail.com





3 commentaires:

  1. Joli texte, belles images et de l'émotion, de vrais baroudeurs 😉🥂
    Merci
    Bonne route
    Bises à vous deux

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  2. un galactique Merci pour ce reportage tout de sensibilité qui permet de vivre avec ses Gardiens d'un des derniers Paradis ,ou la Qualité de Vie passe avant le quantitatif et la médiocratie .Avec nos Affectueuses Pensées Pierre Halima et Séraphin et un grand Bravo.

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  3. Merci de vos encouragements, mais ce sont ces gens et la Nature que l'on découvre qui nous permettent de partager avec vous nos belles découvertes. De fait nous en gardons sous le pied, parfois l'émotion est si forte qu'il est difficile de raconter. Alors le rugby, ce fallacieux prétexte, est bien loin, surtout celui de France. Merci et à bientôt...

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